Qu’est-ce que ça pourrait être, « un inconscient analysé » ?

Perla Miglin

The pass is still a story, in a way, the last story that we tell ourselves, 

and it would be the last story that we tell ourselves about the real.

J.-A. Miller, Lacanian ink 47

Je me suis demandé… ce que serait un inconscient analysé ?

Une ligne de Lacan d’octobre 1980, sous le titre “Lettre pour La Cause freudienne” m’a un peu éclairée : Élaborer l’inconscient, comme cela se fait dans l’analyse, n’est rien de plus que faire son trou. Freud lui-même l’indique.

 Dans le récit d’un rêve on trouvait une expression imprévisible en français (l’hébreu est la langue de son analyse) : « pas d’argent ». Elle revient sur ce rêve quelques séances après, affectée par la confrontation d’un mauvais présage de santé pour son père.  Elle se dit « c’est curieux de percevoir,comme à son insu, dans le rêve, le dire “pas d’argent” en français qui se noue avec la préoccupation pour la santé du père en état d’urgence, “pas d’urgence” ». Signe d’un inconscient en cours d’être analysé ? … « Gewesend analysiert[1] »

 « On pourrait dire que l’analysante fait son deuil pour l’inexistence d’une garantie sur la jouissance. (…) quand les affects ne pointent déjà au père, mais vers un au-delà du savoir inconscient, du sujet supposé savoir, que c’est un nom de l’inconscient, alors se présentent autres relations affectives, avec cet inconscient »[2]

“ Ce qui aura désormais été appris, c’est qu’ « il n’y a pas de Dieu pour faire parler le réel ». A la place du Dieu sujet suppose tout savoir ou d’un Autre censé receler l’énigme de la jouissance, il y a l’ex-sistence de l’ « inconscient réel ». Une psychanalyse pourrait alors produire « un athéisme véritable ».  A celui qui s’est affronte au trou dans le savoir, il appert, comme le dit Lacan, que l’analyse « aura été » le sujet suppose savoir « par hypothèse » car au fond, celui-ci n’est rien de réel. On pourra alors « s’en passer », tout autant que du Nom-du-Père, à condition de « se servir » de ce qui reste, d’ex-sistence notamment. Ce que le transfert avait donc mis en jeu, en le masquant à travers la croyance au sujet suppose savoir, est cet « effet de trou » qui s’avère de l’« inconscient réel »[3]”

…cet « effet de trou » – nœud original du savoir et de la jouissance « qui s’avère de l’inconscient réel » est l’interprétation du rêve. 

Aussi, dans ce petit commentaire confirme ce que Alexandre Stevens indique dans le titre de sa contribution, “ On interprète le rêve et le rêve interprète le réel “.


[1] Lacan, Jacques, Écrits, Seuil, Paris 1966, p. 255.

[2] Éric Laurent : « Mensonges du bonheur », Quarto, n° 99, novembre 2011.

[3] Cf. Vinciguerra, Rose-Paule, Femmes lacaniennes, Éditions Michèle, Paris, 2014, p. 131-132.